mercredi 14 septembre 2016

Un village tout en fleurs


Dans le sud de Pologne se trouve le village de Zalipie. Depuis une centaine d’années, les habitants y ont pour coutume de peindre des motifs floraux sur les murs des maisons. C’est un savoir-faire qui se transmet de génération en génération : les enfants apprennent à l’école à peindre les motifs typiques du village et chaque année on organise des concours pour la plus belle maison peinte.

Ce n’est toutefois pas un village-musée, mais une communauté qui suit le développement économique. Certaines maisons anciennes en bois avec leurs peintures sont sauvegardées, mais on construit aussi du neuf, et si l’extérieur ne se prête pas à la décoration, on peint les pièces à l’intérieur !



Il y a toutefois une maison avec une exposition permanente, c’est l’ancienne demeure de Felicja Curyło (1904-1974), la femme qui a donné de l’essor à cet art. Le régime communiste d’après-guerre encourageait vivement l’art populaire, et les femmes de Zalipie (car cette activité est avant tout féminine) recevaient des commandes pour décorer des magasins, des restaurants et même la salle de jeux des enfants sur un paquebot. En échange, Felicja Curyło a demandé au gouvernement, dans les années 50, qu’on installe l’électricité dans son village ! Elle voulait aussi voir une « maison des peintres » (plus exactement, au féminin : Dom malarek – « maison des femmes peintres ») au village. C’était chose faite en 1977. La maison emploie des peintres qui décorent des objets mis en vente, accueille les visiteurs et organise des ateliers.



Une autre tradition est la fabrication des fleurs en papier de toutes les couleurs. Nous sommes, après tout, dans la région de Cracovie, avec ses coffres richement peints et ses costumes rebrodés. Les habitants de Zalipie ornent leur environnement sans se restreindre : on peint l’étable, la niche du chien, la ruche et le poulailler ! La crèche de Noël est également ornée de motifs typiques, ainsi que l’église paroissiale. Voici l’ancien four typique dans la maison Curyło, ainsi qu’une image pieuse et un vaisselier –  fleuris, fleuris….



Pour une telle promenade, il fallait que je mette un gilet avec des motifs floraux : Cornfield de Sasha Kagan. J’ai rapporté de Zalipie beaucoup d’inspiration et des idées pour des ouvrages à venir !













A village in bloom

In southern Poland you will find a village called Zalipie. For about a hundred years now, its inhabitants have been painting their houses in vivid floral motifs. It is a skill that is passed on from one generation to the next one. Children are taught at the local school how to paint these typical motifs, and every year there is a competition for the most beautifully painted house in the village.



Zalipie is, however, not a museum but a community that lives with its times. Some old wooden painted houses are kept, but new houses are built. If new building materials are not easy to paint on the outside, then the typical motifs are moved indoors to the various rooms!



Still, there is one house with an permanent exhibition. It used to belong to Felicja Curyło (1904-1974), thanks to whom this tradition gained momentum. The post-war Communist government strongly encouraged popular arts and crafts, and the Zalipie women (this activity has mainly been the domain of women) were commissioned to decorate shops, restaurants and even a children’s playroom on an ocean liner. In exchange, Felicja Curyło asked the government in the mid-fifties for electricity in her village! She also wished to see a ‘painters’ house’ (more exactly in the feminine form: Dom malarek – « women painters’ house ») in the village. That dream was realised in 1977. This centre employs painters who decorate objects for sale, receives visitors and holds workshops.


Another tradition is making colourful paper flowers. This is, after all, the region of Cracow, famous for richly painted chests and beautifully embroidered costumes. The people of Zalipie embellish their environment without restraint: they paint the barn, the hen house, the dog’s kennel, the beehive! The Christmas nativity scene is also decorated with the typical floral motifs, and so is the parish church.  In one of the photos you can see a typical old furnace in the Curyło house, as well as a blessed picture and a dresser and its contents – all adorned with flowers!


For this walk, I thought it suitable to wear a floral jacket: Cornfield by Sasha Kagan. I brought back from Zalipie a huge amount of ideas and inspiration for future needlework, believe me!



lundi 5 septembre 2016

Les roses de Dalécarlie (6)


Je retourne vers le sujet du ryssröd – « rouge russe », ce tissu imprimé rouge qui est tellement présent dans les costumes régionaux de Dalécarlie.

C’est un tissu que nous retrouvons dans plusieurs régions d’Europe et d’Asie. Souvent, il apparaît comme la doublure des petites pochettes afghanes ou broderies ouzbèques. En Moravie, des grands foulards imprimés font partie du costume régional. Nous en voyons souvent dans les patchworks anciens – néerlandais, français, anglais ou américains. En France, il est connu sous le nom de rouge adrinople ; an anglais c’est Turkey red. Il y avait des manufactures d’impression dans plusieurs pays : en Russie, en France, en Ecosse….
Ces tissus rouges sont arrivés en Dalécarlie de plusieurs façons. Les femmes de Dalécarlie se déplaçaient loin pour vendre leurs produits d’artisanat, jusqu’en Russie, d’où elles ramenaient ces tissus. Les tissus étaient également vendus par des vendeurs itinérants de la province de Västergötland, où se trouve la grande ville portuaire de Göteborg. Il y avait, enfin, un magasin dans la plus grande ville de Dalécarlie, Falun, dont le propriétaire, un Juif autrichien, importait des tissus d’Europe centrale.
Le ryssröd  apparait souvent dans les costumes de Dalécarlie : comme ce tablier trouvé à Nås, ce bonnet dans le musée de Falun, ou le foulard de Rättvik. Notons aussi la tradition à Rättvik de présenter les enfants au baptême dans un « sac » cousu dans ce tissu traditionnel, qu’on réimprime toujours.
Dans son livre sur les patchworks anciens suèdois, Åsa Wettre a inclus un ouvrage  de Dalécarlie  fait avec ces imprimés de coton. Ils sont également connus sous le nom de kattun, du français coton, anglais cotton ou néerlandais katoen  – mais qui n’est pas le nom générique du « coton » en suèdois !







The Roses of Dalecarlia (6)

I would like to come back to the subject of ryssröd  (‘Russian red’),  that printed red fabric  which is ubiquitous in Dalecarlian regional costumes.
This fabric creeps up in various parts of Europe and Asia. We can often see is as the lining of Afghan purses or Uzbek embroidered panels. In Moravia, large printed scarfs are part of their regional costumes. It also appears in old patchwork quilts, be it Dutch, French, English or American. In English it is called Turkey red, in French rouge adrinople . There were textile mills printing this type of fabric in several countries, for instance Russia, France, or Scotland.
These red fabrics  entered  Dalecarlia in various ways.  Women from Dalecarlia travelled far in order to sell their hand crafted products, all the way to Russia, from where they brought home such fabrics.  These fabrics were also sold by wandering salesmen from the province of Västergötland, where the large port of Gothenburg is situated.  There was also a big fabric shop in the largest town of Dalecarlia, Falun, whose owner, a Jew from Austria,  imported fabric from Central Europe.
Ryssröd  often appears in Dalecarlian costumes ; for instance in the form of this apron found in Nås, this bonnet now in the collection of Falun Museum, or as  this scarf in Rättvik. It is also interesting that there is a tradition in Rättvik of bringing children to the christening ceremony in “bags” made of this traditional fabric, which is still being reprinted.
In her book on old Swedish quilts, Åsa Wettre mentions a patchwork quilt from Dalecarlia made of  such pieces of printed cotton. They are also know under the name of kattun , from French coton, English cotton or Dutch katoen  - which, however, is not the generetic Swedish name for “cotton”!





Réferences:
Rättviks hemslöjd: Rättviksdräkten 2009
Sandberg, Gösta: Purpur, koschenill, krapp, 1994
Wettre, Åsa: Gamla svenska lapptäcken 1993